Votre pathologie
Le pied plat valgus de l’adulte est une pathologie acquise et résulte d’un déséquilibre entre la force du tendon jambier postérieur en interne et le court péronier latéral en externe. Il en résulte une bascule du pied vers la partie interne de celui-ci associée à une abduction (déplacement latéral) du médio-pied et à une pronation de l’avant-pied. Le simple effet du poids sur l’arrière-pied fatigue et étire progressivement toutes les structures internes jusqu’à obtenir une déformation complètement fixée. L’excès pondéral ainsi que le vieillissement global des tissus sont des facteurs régulièrement retrouvés dans ce type de déformation. Vous serez amené à consulter à différents stades de la maladie. On distinguera les stades :
- Stade 1 : où votre tendon jambier postérieur est le siège d’une inflammation, de fissure alors que la déformation est tout à fait réductible et souple. Ce stade requiert plutôt une approche médicale.
- Stade 2 : le tendon est le siège de fissure plus importante voire d’une rupture et s’associe à des déformations plus importantes de l’arrière, du médio et de l’avant-pied restant toutefois souples et en bonne partie réductible. Il peut être divisé en plusieurs sous-rubriques en fonction de la persistance ou non du tendon lui-même et de l’importance des déformations associées. Il requiert plutôt une approche chirurgicale.
- Stade 3 : il correspond à des déformations fixées et s’associe le plus souvent à une rupture ancienne du tendon jambier postérieur. Ce stade requiert plutôt une chirurgie de triple blocage (triple arthrodèse) pour pouvoir restaurer les axes et la qualité de la marche.
Vos examens préopératoires
Le bilan doit comporter au minimum des radiographies de face et de profil du pied et de la cheville en charge, ce qui permettra d’évaluer les axes d’appui (Méary) et le siège de l’abduction (mouvement latéral) du pied. Il vous sera au minimum nécessaire de compléter par une échographie qui permettra de visualiser la qualité du tendon jambier postérieur et les structures ligamentaires internes. L’IRM reste le meilleur examen pour visualiser les lésions du tendon jambier postérieur, elle a l’intérêt de pouvoir être réinterprétée en salle d’opération et permet d’établir une cartographie des lésions. L’ensemble de ces documents devront être disponibles pour votre chirurgien le jour de votre intervention. Les axes d'appui (méary) :
Nos critères d'intervention
Face à un échec du traitement médical bien conduit pendant 6 mois ou lorsque les lésions du tendon jambier postérieur ainsi que les déformations sont significatives, l’option chirurgicale est retenue. C’est alors la réparabilité ou non du tendon jambier postérieur ainsi que l’importance et la réductibilité des déformations du pied qui amèneront votre chirurgien à décider du geste le plus approprié à vous proposer. Au début de la pathologie (stade 1), il est parfois nécessaire de proposer une synovectomie et/ou réparation du tendon jambier postérieur pour pouvoir mieux gérer les douleurs et stopper l’évolution défavorable. A un stade plus évolué (stade 2), une réparation avec transfert d’un demi-tendon jambier antérieur sera proposée associée à une ostéotomie de varisation du calcanéum et une éventuelle ostéotomie d’adduction du médio-pied et ce, si le tendon reste continu et réparable. A un stade plus évolué, un transfert du tendon fléchisseur du gros orteil sera nécessaire pour remplacer le tendon jambier postérieur également associé au geste osseux préalablement décrit. Ces interventions donnent de bons résultats mais au prix d’une convalescence longue et comportant une période de décharge d’en moyenne 8 semaines.
Alternatives thérapeutiques
Au début de la pathologie, le traitement est médical par le port d’une orthèse plantaire (semelles orthopédiques) et s’associera à un traitement anti-inflammatoire ou à de la mésothérapie ou plus encore à une infiltration échoguidée de la gaine du tendon. Les semelles seront utilisées conjointement à l’utilisation de chaussures comportant un contrefort rigide et en quantité significative afin d’assurer un soulagement tendineux efficace. Lorsqu’il existe une contre-indication opératoire, les stades lus évolués peuvent bénéficier d’une chaussure orthopédique sur mesure comportant en général une tige avec des renforts latéraux afin de maintenir et de corriger la bascule de la cheville. Cette solution reste tout à fait acceptable pour des patients âgés et où la comorbidité risque de compromettre une convalescence de qualité. Les causes pour lesquelles le recours à une intervention chirurgicale est abandonné sont multiples :
- Problème d’épaule rendant l’utilisation des béquilles inenvisageable.
- Mauvais état tissulaire et cutané.
- Troubles vasculaires périphériques.
- Diabète déséquilibré.
- Souhait non chirurgical des patients.
Synthèse du bilan préopératoire
Vous présentez un pied plat évolutif et douloureux en raison d’une insuffisance du tendon jambier postérieur. Votre chirurgien a tenté un traitement médical par orthèse plantaire et infiltration locale et ce traitement est en échec. Le bilan radiographique ainsi que la résonance magnétique montrent une bascule importante des structures osseuses et une lésion plus ou moins sévère du tendon jambier postérieur. Vous êtes dès lors candidat à une réparation ou à un remplacement tendineux associé à des gestes qui amèneront à corriger cette bascule du pied. Vous réunissez l’ensemble des critères locaux et généraux et vous avez bien compris les tenants et les aboutissants de cette intervention. Une date opératoire peut dès lors vous être proposée.
Technique chirurgicale
Votre intervention sera réalisée sous anesthésie locorégionale avec pour optimaliser la gestion de la douleur postopératoire un bloc poplité qui sera placé à l’arrière du genou et qui assurera un confort postopératoire pendant les 24 premières heures. L’intervention est réalisée sous garrot placé au mollet. Vous serez installé en position couchée sur le dos et l’intervention durera de 1 à 2 heures. Elle comportera deux temps :
- le premier temps est celui de l’exploration tendineuse réalisée par une incision courbe sous et en arrière de la malléole interne. S’il est décidé de renforcer le tendon, une 2ème cicatrice en avant de la cheville sur environ 6 à 8 cm permettra de prélever un demi-tendon jambier antérieur, celui-ci s’attachant pratiquement au même endroit sur le pied, il peut alors être facilement détourné et apporter un tissu de bonne qualité permettant de réparer le tendon toujours en place mais très abîmé. Par contre, si le tendon est rompu ou de qualité dépassée, on utilisera le tendon du fléchisseur propre du gros orteil qui sera rattaché en lieu et place du tendon jambier postérieur. En effet, le gros orteil possède deux systèmes fléchisseurs et reste tout à fait fonctionnel malgré ce prélèvement
- le deuxième temps correspond à l’ostéotomie du calcanéum avec une correction en varus (ostéotomie de Myerson) réalisée par l’incision en arrière de la malléole ou en percutané. Le déplacement latéral est d’environ 1 cm et est stabilisé par une ou deux vis en titane placées au départ du talon. Ces vis seront complètement enfouies dans l’os et ne devront pas être ôtées.
Si le médio-pied présente un mouvement latéral ou abduction, on ajoutera une ostéotomie d’ouverture du calcanéum (ostéotomie d’Evans) D’autres gestes osseux sur le cou-de-pied pourront être ajoutés à la demande. En fin d’intervention, les différentes cicatrices sont refermées plan par plan et la peau à l’aide d’agrafes. Un demi-plâtre est confectionné en salle d’opération et permettra d’immobiliser les 15 premiers jours sans compression du pied. La douleur postopératoire sera contrôlée par le bloc poplité laissé en place de telle façon à ce que cette chirurgie soit la plus confortable possible pour vous. Le pied sera positionné au lit en position surélevée afin d’éviter l’œdème afin que votre séjour soit le plus confortable possible.
Hospitalisation
La durée moyenne d’hospitalisation est de 24 à 48 heures, elle varie en fonction de l’importance du geste réalisé. Il vous sera demandé de bien garder le pied en position surélevée. L’équipe de rééducation veillera à votre autonomie avant le départ ainsi que l’équipe soignante au bon contrôle de la douleur.
Protocole de rééducation
La rééducation débutera à la fin de l’immobilisation plâtrée entre la 6ème et la 8ème semaine postopératoire. Dès confirmation de la consolidation osseuse, le plâtre sera ôté et une rééducation pourra débuter en décharge dans un premier temps. Elle comportera une récupération d’amplitude de l’ensemble des articulations, un drainage et une mobilisation des cicatrices ainsi qu’un réveil et une tonification progressive musculo-tendineuse et notamment, un travail du jambier postérieur réparé ou remplacé. L’appui sera progressivement introduit et la proprioception débutée. Vous avez droit à 60 séances de rééducation pour ce type de pathologie (2 prescriptions de 30 séances) et celles-ci sont souvent nécessaires.
Autonomie postopératoire
Pendant toute la durée de l’immobilisation plâtrée, l’appui est interdit de même que la conduite d véhicule. Les déplacements en décharge sont autorisés mais doivent être limités durant le début du traitement à environ ¼ d’heure par heure. Il faut en effet à tout prix éviter la souffrance des cicatrices par l’œdème des tissus mous. Les déplacements s’effectueront avec deux cannes béquilles ou un cadre de marche.
Incapacité de travail
Elle est au minimum de 3 à 4 mois mais peut varier en fonction de l’occupation professionnelle.
Les éventuelles complications
Les complications sont celles de toute chirurgie du pied avec en prédilection dans ce type de chirurgie la possibilité de problèmes de cicatrices et des problèmes de fusion osseuse sur les zones d’ostéotomie. Elles sont majorées par la consommation de tabac, par le diabète et par le non-respect des consignes postopératoires. On retrouve également : l’infection, les phlébites, l’algodystrophie, les lésions nerveuses et vasculaires, les raideurs articulaires et arthrose secondaire. Cette liste n’est pas exhaustive.
Calendrier
Assurez-vous à la sortie de l’hôpital qu’un rendez-vous vous a été fixé au 15ème jour postopératoire. Durant cette visite, nous procéderons à la vérification des cicatrices, à l’ablation du système de suture et au changement du plâtre. Il vous sera placé une botte en résine. Un scanner est à organiser par vos soins aux alentours de la 7ème semaine et sera réalisé au travers du plâtre afin d’évaluer la consolidation osseuse des ostéotomies. Les résultats seront évalués lors de la consultation quelques jours plus tard auprès de votre chirurgien. C’est vraisemblablement à ce moment que le plâtre sera ôté et que la rééducation pourra être débutée. Une 3ème voire 4ème consultation sera nécessaire pour évaluer les suites et le résultat.